Le Pape clôt sa visite au Liban en présidant la liturgie sur le front de mer de Beyrouth
02 décembre 2025 · 13:10
Le président de la République, Joseph Aoun, et la Première Dame, Mme Nehmat Aoun, ont participé à la messe célébrée par Sa Sainteté le Pape Léon XIV sur le front de mer de Beyrouth, concluant ainsi sa visite historique au Liban qui a duré trois jours, en présence du Président de la Chambre des députés, Nabih Berri, et de son épouse, Mme Randa ainsi que du Premier ministre, le juge Nawaf Salam, et de son épouse, Mme Sahar Baassiri.
Parmi les présents au cours de la messe le patriarche maronite : le cardinal Mar Béchara Boutros Raï, l’ancien président Michel Sleiman et son épouse, Mme Wafaa, ainsi que Mme Joyce et Mme Solange Gemayel, Mme Mona Harawi, le nonce apostolique Paulo Borgia, le Vice-Président du Parlement, Elias Bou Saab, le Vice-Premier ministre, Tarek Mitri, des ministres et députés actuels et anciens, des personnalités officielles, politiques, religieuses, militaires et sociales, ainsi que le corps diplomatique, plusieurs chefs de partis, la délégation du Saint-Siège accompagnante, les patriarches catholiques du Liban, et des représentants religieux, politiques, judiciaires et sociaux de premier plan.
Environ 150 000 fidèles, venus de toutes les régions du Liban et des pays voisins, s’étaient également rassemblés dès le matin pour prier pour la paix et la stabilité.
L’homélie du pape
Pendant la messe, le Souverain Pontife a prononcé une homélie :
« Chers frères et sœurs, à la fin de ces jours intenses que nous avons vécus ensemble dans la joie, nous célébrons et remercions Dieu pour sa bonté et ses nombreux dons, pour sa présence parmi nous, pour sa parole abondante et tout ce qu’il nous a donné pour être ensemble.
Jésus aussi, comme nous l’avons entendu dans l’Évangile, a remercié le Père, s’adressant à lui ainsi : « Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre » (Luc 21,10).
En réalité, la gratitude ne trouve pas toujours sa place en nous. Parfois, nous nous sentons accablés par la fatigue de la vie, préoccupés et inquiets face aux problèmes qui nous entourent, paralysés par notre incapacité à faire face au mal. De nombreuses situations difficiles nous pèsent, nous inclinant à la résignation et aux plaintes, oubliant l’émerveillement du cœur et la reconnaissance due à Dieu.
Je lance donc cet appel à développer le sentiment de gratitude à vous, peuple libanais bien-aimé. Vous qui avez reçu de Dieu une beauté rare qui orne votre terre, et en même temps témoins et victimes des forces du mal, sous toutes leurs formes, qui défigurent cette beauté.
Depuis cet endroit vaste surplombant la mer, je peux aussi contempler la beauté du Liban, chantée dans les Écritures. Dieu y a planté le cèdre majestueux, l’a nourri et arrosé (cf. Psaume 104,16), et a fait de ses vêtements la parure d’une épouse, exhalant le parfum de cette terre (cf. Cantique des Cantiques 4,11).
À Jérusalem, la ville sainte illuminée par la venue du Christ, il est dit : « La gloire du Liban vient à toi : le cyprès, le chêne et le buisson tous ensemble pour embellir le lieu saint, et sanctifie le sol de mes pieds » (Isaïe 60,13).
Pourtant, cette beauté est marquée par la pauvreté et la souffrance, par des blessures historiques. J’ai prié récemment sur le site de l’explosion du port, et elle est aussi assombrie par de nombreux problèmes que vous affrontez, un contexte politique fragile et souvent instable, une crise économique accablante, ainsi que par la violence et des conflits ravivant d’anciennes peurs.
Dans un tel contexte, la gratitude peut facilement se transformer en déception et ne trouve plus de place dans un cœur accablé, et la source de l’espérance se tarit à cause du doute et de la confusion.
Mais la Parole de Dieu nous invite à percevoir les petites lumières qui brillent au milieu de la nuit sombre, afin d’ouvrir nos cœurs à la gratitude et de nous encourager à nous engager ensemble pour cette terre.
Nous avons entendu Jésus remercier le Père, non pour des actes extraordinaires, mais parce qu’il a révélé sa sagesse aux petits et aux humbles, qui ne cherchent pas l’attention et semblent sans importance ou sans voix. Le royaume de Dieu annoncé par Jésus possède cette caractéristique mentionnée par le prophète Isaïe : c’est un petit rameau qui pousse d’une souche (cf. Isaïe 11,1), un petit espoir qui promet une renaissance lorsque tout semble mort. Ainsi le Christ est venu. Ce petit rameau ne peut être reconnu que par les petits, capables de percevoir les subtilités et les œuvres de Dieu dans une histoire qui semble perdue.
Ceci nous invite aussi à voir, avec nos yeux, le petit rameau qui pousse au milieu d’une histoire douloureuse. Les petites lumières qui brillent dans la nuit, les bourgeons qui naissent et les graines plantées dans ce temps historique aride peuvent être vus par nous ici aujourd’hui. Je pense à votre foi simple et authentique, enracinée dans vos familles et nourrie par vos écoles chrétiennes. Je pense au travail acharné des paroisses, monastères et mouvements apostoliques pour répondre aux besoins des gens. Je pense aux nombreux prêtres et religieux qui se donnent dans leur mission malgré les difficultés. Je pense aux laïcs engagés au service de l’amour et de l’Évangile dans la société.
Pour ces lumières qui s’efforcent d’éclairer les ténèbres et pour ces bourgeons invisibles qui ouvrent la porte de l’espérance pour l’avenir, nous devons aujourd’hui, comme Jésus, dire : « Nous te louons, Père ! » et remercier Dieu de sa présence qui nous empêche de tomber.
En même temps, cette gratitude ne doit pas rester une consolation intérieure illusoire, mais conduire à un changement du cœur, à une conversion et un renouveau dans la vie. Nous devons comprendre que Dieu veut que notre vie soit éclairée par la foi, promesse d’espérance et joie de l’amour. Nous sommes donc tous appelés à cultiver ces bourgeons, à ne pas nous décourager, à ne pas céder à la logique de la violence ni à l’idolâtrie de l’argent, et à ne pas succomber au mal qui se répand.
Chacun doit accomplir son rôle, et ensemble nous devons unir nos efforts pour restaurer la splendeur de cette terre. Il n’y a qu’un seul chemin pour y parvenir : ôter les armes de nos cœurs, abattre les barrières de nos enfermements ethniques et politiques, ouvrir nos appartenances religieuses aux rencontres réciproques et éveiller en nous le rêve d’un Liban uni, où triomphent la paix et la justice, et où chacun peut reconnaître son frère et sa sœur, réalisant enfin ce que le prophète Isaïe a décrit : « Le loup habitera avec l’agneau, le léopard reposera avec le chevreau, et le veau et le lionceau paîtront ensemble » (Isaïe 11,6).
C’est le rêve confié à vous, et ce que le Dieu de la paix place entre vos mains : Ô Liban, lève-toi ! Sois la maison de la justice et de la fraternité ! Sois la prophétie de paix pour tout le Levant !
Chers frères et sœurs, je veux également répéter les paroles de Jésus : « Je te loue, Père ». Je remercie Dieu d’avoir passé ces jours avec vous, portant dans mon cœur vos douleurs et vos espoirs. Je prie pour que la foi en Jésus-Christ, soleil de justice et de bonté, éclaire cette terre du Levant, et qu’elle préserve, par sa puissance, l’espérance qui ne connaît pas de coucher de soleil.
Le patriarche Raï
Avant la fin de la messe, le patriarche Raï a prononcé un discours :
« Très Saint-Père,
Au terme de cette célébration eucharistique, marquée par l'intensité de la foi et la chaleur des liens qui nous unissent, je suis profondément honoré, au nom de l'Assemblée des Patriarches et Évêques Catholiques au Liban, ainsi que de toutes les familles religieuses de notre pays, dignement représentées ici, de vous exprimer notre vive reconnaissance et l'allégresse spirituelle que suscite votre présence paternelle parmi nous. Votre venue illumine nos esprits et ravive notre détermination à œuvrer pour la paix, la fraternité et le dialogue entre tous les fils et filles de notre terre bien-aimée.
Très Saint-Père, votre parole, nourrie par l'Esprit Saint, a résonné dans nos âmes comme un appel à demeurer des témoins fidèles du Christ, porteurs de lumière, de justice, d'espérance et de paix.
Vous nous rappelez avec force que notre mission, en ces temps difficiles, est de bâtir des ponts, d'encourager l'unité et de servir le bien commun de notre nation et de la région.
Nous vous remercions pour votre sollicitude envers nos fidèles, vos encouragements envers les jeunes et les familles, et pour votre présence consolante auprès de ceux qui portent le poids de la souffrance et de l'épreuve. Votre message de fraternité et de communion entre chrétiens et musulmans, et plus largement entre toutes les composantes de notre société libanaise, est un phare qui éclaire notre sortie des épreuves et guide nos cœurs vers la vie retrouvée.
Très Saint-Père, nous vous renouvelons l'expression de notre indéfectible attachement filial, ainsi que l'assurance de notre prière fervente pour votre ministère apostolique et pour l'Église universelle. Que le Seigneur soutienne vos pas de Messager de paix, et que la Sainte Vierge, Notre-Dame du Liban, vous entoure de sa tendresse maternelle et veille sur vous dans votre haute mission de Pontife de la fraternité universelle et de la paix perpétuelle.
Merci, Très Saint-Père, pour ce que vous êtes, pour votre bénédiction, votre amour et votre proximité paternelle. »
L’Appel de Sa Sainteté le Pape
Sa Sainteté le Pape a lancé un appel dans lequel il a déclaré :
« Chers frères et sœurs,
En ces jours, au cours de ma première visite apostolique, réalisée durant l’année jubilaire, j’ai désiré être un pèlerin d’espérance au Moyen-Orient, et implorer de Dieu le don de la paix pour cette terre bien-aimée, marquée par l’instabilité, les guerres et la souffrance.
Chers chrétiens, chrétiens d’Orient, si les fruits de vos efforts pour la paix se font attendre, je vous invite à lever les yeux vers le Seigneur Jésus-Christ qui viendra ! Regardons-le avec espérance et courage, et invitons chacun à marcher sur le chemin de la vie commune, de la fraternité et de la paix. Soyez des bâtisseurs de paix, des annonciateurs de paix, et des témoins de paix !
Le Moyen-Orient a besoin de nouvelles positions, pour rejeter la logique de la vengeance et de la violence, pour dépasser les divisions politiques, sociales et religieuses, et pour ouvrir de nouvelles pages au nom de la réconciliation et de la paix. Nous avons suivi pendant longtemps le chemin de l’hostilité mutuelle et de la destruction, dans la peur des guerres, et nous en constatons tous aujourd’hui les douloureux résultats. Nous devons changer de cap et éduquer nos cœurs à la paix.
Depuis cette place, je prie pour tous les peuples qui souffrent à cause de la guerre. Je prie également avec espoir pour qu’une solution pacifique soit trouvée aux différends politiques actuels en Guinée-Bissau. Je n’oublie pas non plus les victimes de l’incendie à Hong Kong et leurs familles chéries.
Je prie tout particulièrement pour le Liban bien-aimé ! Je renouvelle mon appel à la communauté internationale à ne ménager aucun effort pour favoriser les voies du dialogue et de la réconciliation. Du fond de mon cœur, je lance un appel à tous ceux à qui la responsabilité politique et sociale a été confiée, ici et dans tous les pays épuisés par la guerre et la violence : écoutez le cri de vos peuples qui réclament la paix ! Mettons-nous tous au service de la vie, du bien commun et du développement intégral de la personne humaine.
Enfin, vous, chrétiens d’Orient, habitants originels de ces terres, je vous répète : prenez courage ! Toute l’Église vous regarde avec affection et admiration. Que toujours Notre-Dame, la Vierge attentive, vous protège. »
Le calice de l’Eucharistie
À la fin du discours du patriarche, le pape a reçu en cadeau un calice eucharistique.
Le patriarche Absi
Avant la messe, le patriarche d’Antioche et de tout l’Orient des Grecs catholiques, Youssef Absi, avait prononcé un discours de bienvenue :
« Votre Sainteté, le pape Léon, en ce jour et en ce moment, ces nombreuses foules venues du Liban et même de l’étranger se sont rassemblées pour vous voir, vous écouter, prier avec vous et puiser en vous force, espoir, joie et réconfort.
Ces foules sont venues de ce pays, le Liban, connu comme le pays de la paix, pour vous rendre le salut que vous avez offert au monde entier après votre élection avec l’annonce : ‘Paix à vous tous’. Ces foules sont venues pour vous dire : ‘Et avec votre esprit’, et ‘Soyez le bienvenu’, accueillant Votre Sainteté au Liban, étendant de tout cœur des rameaux pour orner votre passage et s’écriant, à l’instar des foules le jour des Rameaux : ‘Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur’. »
Il a ajouté : « Votre Sainteté, ces fidèles qui vous saluent et prient avec vous, ici et maintenant, sont les membres des Églises orientales chères à votre cœur. Ces fidèles sont ceux qui vous avez visiter en premier et à qui vous avez exprimé votre profonde estime et votre désir de les soutenir et de les protéger, car elles sont un trésor pour l’Église universelle et leur présence au Liban et dans la région est irremplaçable. De Rome à Constantinople, jusqu’à Antioche, un parcours de foi que vous avez voulu, Votre Sainteté, traduire en actes tout en exprimant, en même temps, notre désir à tous d’être unis pour que le monde croie. »
Il a poursuivi : « Le Christ dit à Pierre : ‘Tu es le rocher, et sur cette pierre je bâtirai mon Église.’ Voici maintenant son successeur à Rome, présidant dans l’amour, venu pour ‘fortifier ses frères’ au Liban et dans un Orient confus et égaré. Notre invitation aujourd’hui est de prier avec vous et d’entendre de votre part des paroles de fermeté dans la foi, l’espérance et l’amour.
« Votre présence en ce moment critique porte en elle un message profond d’espérance, témoignant de la proximité du Siège apostolique romain avec le peuple libanais en particulier et avec les peuples de la région en général. Nous espérons que vous poursuivrez, Très Saint-Père, vos efforts constants, accompagnés de la prière, sur les pas de vos prédécesseurs, afin que le Dieu de paix nous accorde la paix, et que nos enfants demeurent fermes sur leur terre et dans leur mission, devenant des phares de la coexistence et des témoins pour le monde que l’humanité est une, et que l’amitié, le voisinage et la citoyenneté sont plus forts et plus durables que la division.
Et Absi a conclu : « Votre venue au Liban, Très Saint-Père, ne consiste pas seulement à suivre les pas de vos prédécesseurs, mais elle porte un message élevé pour ceux que vous avez rencontrés, en particulier les consacrés et les jeunes. Par votre visite au sanctuaire de Saint Charbel, aux malades à l’Hôpital Psychiatrique de la Croix, ainsi qu’aux déplacés et blessés à proximité, vous nous avez montré vos priorités : la prière et le soin des personnes épuisées. Nous quitterons ce lieu et sortirons de cette liturgie divine qui façonne notre unité, le cœur rempli de joie et de paix que nul ni rien ne pourra nous enlever, car ce sont les promesses du Seigneur.
« Saint-Père, tout en remerciant Dieu de nous avoir donné un chef de prêtre tel que vous, nous vous implorons votre bénédiction apostolique, en notre nom, tous ceux qui sont à vos côtés, et au nom de nombreux autres qui vous voient et vous écoutent à distance. Nous vous serrons la main en disant : ‘La paix du Christ’, ‘Le Christ est parmi nous’, ‘Soyez le bienvenu.’ »
Vers l’aéroport
Après la messe, le pape a prié devant l’icône de la Vierge, saluant les fidèles qui l’ont acclamé en agitant les drapeaux libanais et ceux du Vatican et criant « Viva il Papa ».
Après avoir quitté l’autel, Sa Sainteté a tenu à saluer personnellement un certain nombre de fidèles, ainsi que les forces de sécurité qui l’ont accompagné et les motards qui l’ont escorté lors de ses déplacements au Liban, leur offrant des cadeaux souvenirs.
Il s’est ensuite rendu à l’aéroport international de Beyrouth Rafic Hariri, concluant ainsi sa visite historique au Liban.
Port de Beyrouth
Avant d’atteindre le front de mer, Sa Sainteté a observé un temps de prière pour les victimes de l’explosion du port de Beyrouth du 4 août 2020 et pour la guérison des cœurs meurtris, en présence du président Salam et de plusieurs responsables officiels. Dans un moment émouvant, il a rencontré les familles des martyrs, leur a offert son réconfort et a exprimé sa profonde compassion, écoutant leur souffrance et la douleur de leur perte.
Parmi les présents au cours de la messe le patriarche maronite : le cardinal Mar Béchara Boutros Raï, l’ancien président Michel Sleiman et son épouse, Mme Wafaa, ainsi que Mme Joyce et Mme Solange Gemayel, Mme Mona Harawi, le nonce apostolique Paulo Borgia, le Vice-Président du Parlement, Elias Bou Saab, le Vice-Premier ministre, Tarek Mitri, des ministres et députés actuels et anciens, des personnalités officielles, politiques, religieuses, militaires et sociales, ainsi que le corps diplomatique, plusieurs chefs de partis, la délégation du Saint-Siège accompagnante, les patriarches catholiques du Liban, et des représentants religieux, politiques, judiciaires et sociaux de premier plan.
Environ 150 000 fidèles, venus de toutes les régions du Liban et des pays voisins, s’étaient également rassemblés dès le matin pour prier pour la paix et la stabilité.
L’homélie du pape
Pendant la messe, le Souverain Pontife a prononcé une homélie :
« Chers frères et sœurs, à la fin de ces jours intenses que nous avons vécus ensemble dans la joie, nous célébrons et remercions Dieu pour sa bonté et ses nombreux dons, pour sa présence parmi nous, pour sa parole abondante et tout ce qu’il nous a donné pour être ensemble.
Jésus aussi, comme nous l’avons entendu dans l’Évangile, a remercié le Père, s’adressant à lui ainsi : « Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre » (Luc 21,10).
En réalité, la gratitude ne trouve pas toujours sa place en nous. Parfois, nous nous sentons accablés par la fatigue de la vie, préoccupés et inquiets face aux problèmes qui nous entourent, paralysés par notre incapacité à faire face au mal. De nombreuses situations difficiles nous pèsent, nous inclinant à la résignation et aux plaintes, oubliant l’émerveillement du cœur et la reconnaissance due à Dieu.
Je lance donc cet appel à développer le sentiment de gratitude à vous, peuple libanais bien-aimé. Vous qui avez reçu de Dieu une beauté rare qui orne votre terre, et en même temps témoins et victimes des forces du mal, sous toutes leurs formes, qui défigurent cette beauté.
Depuis cet endroit vaste surplombant la mer, je peux aussi contempler la beauté du Liban, chantée dans les Écritures. Dieu y a planté le cèdre majestueux, l’a nourri et arrosé (cf. Psaume 104,16), et a fait de ses vêtements la parure d’une épouse, exhalant le parfum de cette terre (cf. Cantique des Cantiques 4,11).
À Jérusalem, la ville sainte illuminée par la venue du Christ, il est dit : « La gloire du Liban vient à toi : le cyprès, le chêne et le buisson tous ensemble pour embellir le lieu saint, et sanctifie le sol de mes pieds » (Isaïe 60,13).
Pourtant, cette beauté est marquée par la pauvreté et la souffrance, par des blessures historiques. J’ai prié récemment sur le site de l’explosion du port, et elle est aussi assombrie par de nombreux problèmes que vous affrontez, un contexte politique fragile et souvent instable, une crise économique accablante, ainsi que par la violence et des conflits ravivant d’anciennes peurs.
Dans un tel contexte, la gratitude peut facilement se transformer en déception et ne trouve plus de place dans un cœur accablé, et la source de l’espérance se tarit à cause du doute et de la confusion.
Mais la Parole de Dieu nous invite à percevoir les petites lumières qui brillent au milieu de la nuit sombre, afin d’ouvrir nos cœurs à la gratitude et de nous encourager à nous engager ensemble pour cette terre.
Nous avons entendu Jésus remercier le Père, non pour des actes extraordinaires, mais parce qu’il a révélé sa sagesse aux petits et aux humbles, qui ne cherchent pas l’attention et semblent sans importance ou sans voix. Le royaume de Dieu annoncé par Jésus possède cette caractéristique mentionnée par le prophète Isaïe : c’est un petit rameau qui pousse d’une souche (cf. Isaïe 11,1), un petit espoir qui promet une renaissance lorsque tout semble mort. Ainsi le Christ est venu. Ce petit rameau ne peut être reconnu que par les petits, capables de percevoir les subtilités et les œuvres de Dieu dans une histoire qui semble perdue.
Ceci nous invite aussi à voir, avec nos yeux, le petit rameau qui pousse au milieu d’une histoire douloureuse. Les petites lumières qui brillent dans la nuit, les bourgeons qui naissent et les graines plantées dans ce temps historique aride peuvent être vus par nous ici aujourd’hui. Je pense à votre foi simple et authentique, enracinée dans vos familles et nourrie par vos écoles chrétiennes. Je pense au travail acharné des paroisses, monastères et mouvements apostoliques pour répondre aux besoins des gens. Je pense aux nombreux prêtres et religieux qui se donnent dans leur mission malgré les difficultés. Je pense aux laïcs engagés au service de l’amour et de l’Évangile dans la société.
Pour ces lumières qui s’efforcent d’éclairer les ténèbres et pour ces bourgeons invisibles qui ouvrent la porte de l’espérance pour l’avenir, nous devons aujourd’hui, comme Jésus, dire : « Nous te louons, Père ! » et remercier Dieu de sa présence qui nous empêche de tomber.
En même temps, cette gratitude ne doit pas rester une consolation intérieure illusoire, mais conduire à un changement du cœur, à une conversion et un renouveau dans la vie. Nous devons comprendre que Dieu veut que notre vie soit éclairée par la foi, promesse d’espérance et joie de l’amour. Nous sommes donc tous appelés à cultiver ces bourgeons, à ne pas nous décourager, à ne pas céder à la logique de la violence ni à l’idolâtrie de l’argent, et à ne pas succomber au mal qui se répand.
Chacun doit accomplir son rôle, et ensemble nous devons unir nos efforts pour restaurer la splendeur de cette terre. Il n’y a qu’un seul chemin pour y parvenir : ôter les armes de nos cœurs, abattre les barrières de nos enfermements ethniques et politiques, ouvrir nos appartenances religieuses aux rencontres réciproques et éveiller en nous le rêve d’un Liban uni, où triomphent la paix et la justice, et où chacun peut reconnaître son frère et sa sœur, réalisant enfin ce que le prophète Isaïe a décrit : « Le loup habitera avec l’agneau, le léopard reposera avec le chevreau, et le veau et le lionceau paîtront ensemble » (Isaïe 11,6).
C’est le rêve confié à vous, et ce que le Dieu de la paix place entre vos mains : Ô Liban, lève-toi ! Sois la maison de la justice et de la fraternité ! Sois la prophétie de paix pour tout le Levant !
Chers frères et sœurs, je veux également répéter les paroles de Jésus : « Je te loue, Père ». Je remercie Dieu d’avoir passé ces jours avec vous, portant dans mon cœur vos douleurs et vos espoirs. Je prie pour que la foi en Jésus-Christ, soleil de justice et de bonté, éclaire cette terre du Levant, et qu’elle préserve, par sa puissance, l’espérance qui ne connaît pas de coucher de soleil.
Le patriarche Raï
Avant la fin de la messe, le patriarche Raï a prononcé un discours :
« Très Saint-Père,
Au terme de cette célébration eucharistique, marquée par l'intensité de la foi et la chaleur des liens qui nous unissent, je suis profondément honoré, au nom de l'Assemblée des Patriarches et Évêques Catholiques au Liban, ainsi que de toutes les familles religieuses de notre pays, dignement représentées ici, de vous exprimer notre vive reconnaissance et l'allégresse spirituelle que suscite votre présence paternelle parmi nous. Votre venue illumine nos esprits et ravive notre détermination à œuvrer pour la paix, la fraternité et le dialogue entre tous les fils et filles de notre terre bien-aimée.
Très Saint-Père, votre parole, nourrie par l'Esprit Saint, a résonné dans nos âmes comme un appel à demeurer des témoins fidèles du Christ, porteurs de lumière, de justice, d'espérance et de paix.
Vous nous rappelez avec force que notre mission, en ces temps difficiles, est de bâtir des ponts, d'encourager l'unité et de servir le bien commun de notre nation et de la région.
Nous vous remercions pour votre sollicitude envers nos fidèles, vos encouragements envers les jeunes et les familles, et pour votre présence consolante auprès de ceux qui portent le poids de la souffrance et de l'épreuve. Votre message de fraternité et de communion entre chrétiens et musulmans, et plus largement entre toutes les composantes de notre société libanaise, est un phare qui éclaire notre sortie des épreuves et guide nos cœurs vers la vie retrouvée.
Très Saint-Père, nous vous renouvelons l'expression de notre indéfectible attachement filial, ainsi que l'assurance de notre prière fervente pour votre ministère apostolique et pour l'Église universelle. Que le Seigneur soutienne vos pas de Messager de paix, et que la Sainte Vierge, Notre-Dame du Liban, vous entoure de sa tendresse maternelle et veille sur vous dans votre haute mission de Pontife de la fraternité universelle et de la paix perpétuelle.
Merci, Très Saint-Père, pour ce que vous êtes, pour votre bénédiction, votre amour et votre proximité paternelle. »
L’Appel de Sa Sainteté le Pape
Sa Sainteté le Pape a lancé un appel dans lequel il a déclaré :
« Chers frères et sœurs,
En ces jours, au cours de ma première visite apostolique, réalisée durant l’année jubilaire, j’ai désiré être un pèlerin d’espérance au Moyen-Orient, et implorer de Dieu le don de la paix pour cette terre bien-aimée, marquée par l’instabilité, les guerres et la souffrance.
Chers chrétiens, chrétiens d’Orient, si les fruits de vos efforts pour la paix se font attendre, je vous invite à lever les yeux vers le Seigneur Jésus-Christ qui viendra ! Regardons-le avec espérance et courage, et invitons chacun à marcher sur le chemin de la vie commune, de la fraternité et de la paix. Soyez des bâtisseurs de paix, des annonciateurs de paix, et des témoins de paix !
Le Moyen-Orient a besoin de nouvelles positions, pour rejeter la logique de la vengeance et de la violence, pour dépasser les divisions politiques, sociales et religieuses, et pour ouvrir de nouvelles pages au nom de la réconciliation et de la paix. Nous avons suivi pendant longtemps le chemin de l’hostilité mutuelle et de la destruction, dans la peur des guerres, et nous en constatons tous aujourd’hui les douloureux résultats. Nous devons changer de cap et éduquer nos cœurs à la paix.
Depuis cette place, je prie pour tous les peuples qui souffrent à cause de la guerre. Je prie également avec espoir pour qu’une solution pacifique soit trouvée aux différends politiques actuels en Guinée-Bissau. Je n’oublie pas non plus les victimes de l’incendie à Hong Kong et leurs familles chéries.
Je prie tout particulièrement pour le Liban bien-aimé ! Je renouvelle mon appel à la communauté internationale à ne ménager aucun effort pour favoriser les voies du dialogue et de la réconciliation. Du fond de mon cœur, je lance un appel à tous ceux à qui la responsabilité politique et sociale a été confiée, ici et dans tous les pays épuisés par la guerre et la violence : écoutez le cri de vos peuples qui réclament la paix ! Mettons-nous tous au service de la vie, du bien commun et du développement intégral de la personne humaine.
Enfin, vous, chrétiens d’Orient, habitants originels de ces terres, je vous répète : prenez courage ! Toute l’Église vous regarde avec affection et admiration. Que toujours Notre-Dame, la Vierge attentive, vous protège. »
Le calice de l’Eucharistie
À la fin du discours du patriarche, le pape a reçu en cadeau un calice eucharistique.
Le patriarche Absi
Avant la messe, le patriarche d’Antioche et de tout l’Orient des Grecs catholiques, Youssef Absi, avait prononcé un discours de bienvenue :
« Votre Sainteté, le pape Léon, en ce jour et en ce moment, ces nombreuses foules venues du Liban et même de l’étranger se sont rassemblées pour vous voir, vous écouter, prier avec vous et puiser en vous force, espoir, joie et réconfort.
Ces foules sont venues de ce pays, le Liban, connu comme le pays de la paix, pour vous rendre le salut que vous avez offert au monde entier après votre élection avec l’annonce : ‘Paix à vous tous’. Ces foules sont venues pour vous dire : ‘Et avec votre esprit’, et ‘Soyez le bienvenu’, accueillant Votre Sainteté au Liban, étendant de tout cœur des rameaux pour orner votre passage et s’écriant, à l’instar des foules le jour des Rameaux : ‘Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur’. »
Il a ajouté : « Votre Sainteté, ces fidèles qui vous saluent et prient avec vous, ici et maintenant, sont les membres des Églises orientales chères à votre cœur. Ces fidèles sont ceux qui vous avez visiter en premier et à qui vous avez exprimé votre profonde estime et votre désir de les soutenir et de les protéger, car elles sont un trésor pour l’Église universelle et leur présence au Liban et dans la région est irremplaçable. De Rome à Constantinople, jusqu’à Antioche, un parcours de foi que vous avez voulu, Votre Sainteté, traduire en actes tout en exprimant, en même temps, notre désir à tous d’être unis pour que le monde croie. »
Il a poursuivi : « Le Christ dit à Pierre : ‘Tu es le rocher, et sur cette pierre je bâtirai mon Église.’ Voici maintenant son successeur à Rome, présidant dans l’amour, venu pour ‘fortifier ses frères’ au Liban et dans un Orient confus et égaré. Notre invitation aujourd’hui est de prier avec vous et d’entendre de votre part des paroles de fermeté dans la foi, l’espérance et l’amour.
« Votre présence en ce moment critique porte en elle un message profond d’espérance, témoignant de la proximité du Siège apostolique romain avec le peuple libanais en particulier et avec les peuples de la région en général. Nous espérons que vous poursuivrez, Très Saint-Père, vos efforts constants, accompagnés de la prière, sur les pas de vos prédécesseurs, afin que le Dieu de paix nous accorde la paix, et que nos enfants demeurent fermes sur leur terre et dans leur mission, devenant des phares de la coexistence et des témoins pour le monde que l’humanité est une, et que l’amitié, le voisinage et la citoyenneté sont plus forts et plus durables que la division.
Et Absi a conclu : « Votre venue au Liban, Très Saint-Père, ne consiste pas seulement à suivre les pas de vos prédécesseurs, mais elle porte un message élevé pour ceux que vous avez rencontrés, en particulier les consacrés et les jeunes. Par votre visite au sanctuaire de Saint Charbel, aux malades à l’Hôpital Psychiatrique de la Croix, ainsi qu’aux déplacés et blessés à proximité, vous nous avez montré vos priorités : la prière et le soin des personnes épuisées. Nous quitterons ce lieu et sortirons de cette liturgie divine qui façonne notre unité, le cœur rempli de joie et de paix que nul ni rien ne pourra nous enlever, car ce sont les promesses du Seigneur.
« Saint-Père, tout en remerciant Dieu de nous avoir donné un chef de prêtre tel que vous, nous vous implorons votre bénédiction apostolique, en notre nom, tous ceux qui sont à vos côtés, et au nom de nombreux autres qui vous voient et vous écoutent à distance. Nous vous serrons la main en disant : ‘La paix du Christ’, ‘Le Christ est parmi nous’, ‘Soyez le bienvenu.’ »
Vers l’aéroport
Après la messe, le pape a prié devant l’icône de la Vierge, saluant les fidèles qui l’ont acclamé en agitant les drapeaux libanais et ceux du Vatican et criant « Viva il Papa ».
Après avoir quitté l’autel, Sa Sainteté a tenu à saluer personnellement un certain nombre de fidèles, ainsi que les forces de sécurité qui l’ont accompagné et les motards qui l’ont escorté lors de ses déplacements au Liban, leur offrant des cadeaux souvenirs.
Il s’est ensuite rendu à l’aéroport international de Beyrouth Rafic Hariri, concluant ainsi sa visite historique au Liban.
Port de Beyrouth
Avant d’atteindre le front de mer, Sa Sainteté a observé un temps de prière pour les victimes de l’explosion du port de Beyrouth du 4 août 2020 et pour la guérison des cœurs meurtris, en présence du président Salam et de plusieurs responsables officiels. Dans un moment émouvant, il a rencontré les familles des martyrs, leur a offert son réconfort et a exprimé sa profonde compassion, écoutant leur souffrance et la douleur de leur perte.